Cannes se réveille dans l douceur du petit matin  et j'ai envie de maki-é.

Pas vous ?

Dans le post précédent et avant de se lancer dans la rédaction d'une somme aussi complète qu'inoubliable sur le sujet,que je laisserai plutôt à la rubrique Namiki,je vous rappelle que "maki" signifie saupoudrer et "é" veut dire tableau.

 

Nous sommes donc à la confluence de la peinture et des arts décoratifs.

Le laque est le médium ,l'or et l'argent servant de révélateur afin de faire apparaître un décor qui sera renforcé de pigments mélangés au laque.

L'effet de contraste proviendra du fond sombre,qui pourra être rouge ,noir ou brun ,mais pas exclusivement.

Posséder un objet en maki-é relève donc largement d'un soucis de prestige et de raffinement ,qui magnifie celui qui le porte .

 

Comme le yatate,son ancêtre direct,le porte -pinceau que le guerrier protégeait dans son carquois et dont il a gardé la racine "ya",la flêche,un stylo est un sagemono ,c'est à dire un objet que l'on porte sur soi.

A ce titre ,comme tous les objets précieux attachés à notre personne,il est soumis à tous les petits dangers du quotidien,ce qui explique le choix du laque ,meilleur moyen qu'on ait jamais trouvé en Asie ,pour protéger les choses "fragiles".

Le laque s'exprime comme notion d'immortalité,comme l'or et l'argent ,Yang et Yin.

Il était donc impensable de ne pas les associer concrètement dans une symbolique ,qui ne vaut que par son efficacité.

 

L'or ,l'argent ,comme la lune et le soleil font partie de la nature et ce serait se tromper lourdement que croire que la "Voie" les ignore.

Revenons ,après cette mise en place conceptuelle ,au coeur de notre sujet (mais ,nous en sommes-nous éloignés ?),à savoir la gamme maki-é de la famille Yukari Royale.

 

Outre les deux modèles de la série Chin-Kin sur lesquels nous reviendrons,nous relevons deux sous-familles,qui se différencient par leur qualité d'éxecution.

 

Dans le premier groupe (pour les photos ,consultez ,par exemple le site de Plume et Bille Paris ),on peut admirer deux modèles .

Le premier ,"Fukyose",les fleurs séchées exprimant toute la nostalgie de l'automne ,avec l'image du retrait du yang dans la terre.

La vie se retire provisoirement pour se regénèrer et renaître ultérieurement.

 

On note ,au passage de belles inclusions d'abalone ,en forme de pétales d'une fleur que je n'ai pas encore réussi à identifier.

L'autre modèle "Scène de nuit"est caractéristique du point de vue de la peinture chinoise concernant la perspective.Le thème s'inspire très probablement du pélerinage à la falaise verte,avec un clin d'oeil coquin,mais demeure parfaitement dans l'esprit du texte,par ces claustras du pavillon de thé,éclairées de l'intérieur...

L'autre sous-famille se compose du Martin-pêcheur",kawasemi,image de pureté et de "l'aigrette",ce tueur à échasses ,dont parlait Issa,si ma mémoire ne me trahit pas.

 

Prenez le temps de plonger à la loupe dans ce regard reptilien tout en concentration,prêt à s'abattre sur l'ablette étourdie trompée par l'apparente immobilité .Le détail du plumage et le thème des saules seront étudiés ultérieurement.

 

Quand à notre kawasemi,ma mémoire semble plus réceptive au souvenir de ces vers d'Issa sous la forme d'un haiku,qui nous dit "Martin -pêcheur,sur tes ailes mouillées,le reflet du couchant".

 

Et puis ,bien sûr,illustré par la photo ci-dessous le spendide "Carrosse de la cour et glycine", inspiré d'un chapitre du Genji Monogatari de l'exquise "Dame pourpre",qui fera l'objet d'une étude spécifique.

Mon Dieu,quel travail vous me donnez !

 

Pour clore provisoirement le sujet,notez que la gamme ,comme je l'ai indiqué plus haut ,est complétée par deux modèles en chin -kin ,malheureusement discontinués suite au décès de l'artiste.

 

C'est sans doute sur cette série,que Namiki nous prépare ,sans doute,quelques surprises.

Bonne journée.